Je suis entrée dans l'église...
« il y avait une personne, et le regard plein de vie du plâtre des statues… »
Quelques mots d’une chanson de Francis Cabrel revisitée à ma façon. Je m’étais arrêtée « il y a quelques jours quelques nuits » devant l’entrée de mon église, et je n’avais pas conté qui j’avais croisé.
Après avoir grimpé les marches une à une…
Je suis entrée, non pas dans l’église,
mais dans cet espace fermé aux portes acajou,
qui préparent le visiteur à la méditation, au silence…
J’étais attendue,
Donc, très impatiente de découvrir
« la présence dans le silence ».
Le maître des lieux,
Saint André,
était occupé à regarder le ciel.
Nul doute qu’il était en grande conversation,
avec le « Grand patron »
Je n’osais le déranger,
et tournais mon regard pour avoir une vue d’ensemble.
Timide, j’avançais en diagonale,
l’allée centrale trop impressionnante.
J’essayais tant bien que mal de faire connaissance avec la dame à moins que, ce ne soit un monsieur. Un petit air de Jeanne d’Arc sans armure, je n’insistais pas, et poursuivais ma visite…
- Bonjour Monsieur, bonjour petitou !
J’ai tenté en vain de faire connaissance avec votre voisine, elle n’a pas daigné me regarder.
- Il fallait regarder la petite note en dessous. Nous n’avons pas l’habitude de causer directement avec les visiteurs, encore moins décliner nos identités. Je ferais une exception pour vous demoiselle…
Je suis Joseph et voici Jésus.
- Infiniment flattée de votre sollicitude à comprendre mon ignorance et ma curiosité. Je vais de ce pas rejoindre quelqu’un qui m’interpelle …
- Bonjour Nathalie !
Je suis Saint Jacques, de Compostelle…
Regarde un peu ce que je me suis fais ! J’ai demandé que l’on me soigne, on m’a dit d’attendre ici. Depuis, dans ce recoin je suis…
- Hooo… bonjour Saint Jacques ! Je vous ai immédiatement reconnu par les coquillages qui ornent vos vêtements… je ne savais pas que vous aviez un chien ? Il a l’air tellement gentil !
Les serviteurs du « grand patron » sont dans l’arrière-cour, ils ont dû vous oublier, je tacherais d’en parler. Il est bien dommage que vous ne soyez pas soigné et mis plus en valeur comme vos confrères !
Tout vient à qui sait attendre…
- Bonjour Madame !
Vous m’avez l’air tristounette et pensive…
- Bonjour Nathalie !
Je suis nostalgique en effet. Il fut un temps où nos églises étaient plus animées. Je suis Sainte Anne, la sœur de Marie.
- Il ne faut pas être triste Anne, il y a encore des festivités de temps en temps, parfois des accompagnements pour ceux qui passent de l’autre côté du ciel. Savez-vous qu’il y a bientôt quarante deux ans j’ai été baptisé ici ?
- Je m’en souviens, je m’en souviens… un petit chat « espeillé » disait ta maman toute fière de son enfant. Tu as bien grandi !
Reviens plus souvent ! Tu sais que cela nous fait plaisir à tous…
J’avançais toujours, et de loin,
je vis une dame bien pensive…
- Bonjour Sainte Thérèse !
Anne m’a parlé de sa nostalgie de la belle époque,
celle où l’église recevait régulièrement.
- Bonjour Nathalie !
J’y pense souvent avec mélancolie…
- Vois-tu, nous avons choisi de suivre « le grand patron ». Certes, ce n’est pas tous les jours faciles, mais son amour pour nous est si grand… impossible de descendre de notre piédestal ! Dès que j’ai un petit coup de blues, il est là et me redonne une force phénoménale !
- Et bien, il faudra que je vienne plus souvent « le » rencontrer !
- Je t’attendrai…
Je continuais mes tours et mes contours à travers les coursives des habitants des lieux, jusqu’à ce qu’un rayon de soleil attire mon œil vers un porche que je connaissais bien.
Celui des mariés...
- Bonjour Marie !
Vous avez un bien bel espace pour recevoir des visites et les fleurs des « novies »…
- Bonjour Nathalie !
Il y en a de moins en moins des « novies »
Les amoureux préfèrent présenter leur alliance vers l’office républicain, délaissant celui plus céleste de mon fils. Mais bon, nous avons la primeur de leur dernier jour sur terre, leur renaissance dans l’autre monde…
- Mais ! Je rêve où vous m’avez fait un clin d’œil !
- Qui ? Moi ?
Je suis une sainte…
- Coucou Nathalie, c’est encore moi Marie !
- Bien ça alors ! Je ne vous connaissais pas…
il y a combien de Sainte Marie dans cette église ?
- Je suis toujours la même…
Tu as raison, je t’ai fait un clin d’œil tout à l’heure, mais chut ! Il ne faut pas le dire ! Nous avons pour consigne de rester « de marbre » ! Si nous racontions que nous nous interpellons et bavardons toute la journée, cela ferait mauvaise impression...
Là je suis avec mon fiston, il passe de bras en bras. Par quatre fois j’ai voulu lui parler, il m’a répondu qu’il était en connexion avec « le Grand Patron », son père, et le saint esprit…
Les chaises alignées me tendaient les bras,
j’avais bien envie de me poser sur l’une d’elles…
C’est en m’approchant de plus près, que je compris qu’elles n’étaient pas comme les autres… mémé Irène en avait une, exactement la même dans sa chambre, toute rouge !
Etrange, vous avez dit étrange,
comme c’est étrange…
Le tissu avait l’air de dater de Mathusalem,
la croix m’interdisait implicitement de m’asseoir.
La chaise rouge me tentait bien,
mais bon…
Mais quel était ce tableau si grand, perché la haut ?
Il y avait une grande fête…
Serait-ce les festivités dont parlaient Anne et Thérèse ?
Juste en dessous, l’autel, avec un grand livre.
J’aimais bien les couleurs de la couverture de l'ouvrage de paroles sages,
j’avais envie de tourner les pages,
mais….
les sigles sur le carrelage m’attirèrent encore plus.
Que signifiait JHS ?
Je retrouvais une fois encore Sainte Marie avec son bébilou.
C’était rigolo, il y avait plein de bébés avec des ailes…
Un monsieur me montrait une dame agenouillée ?
- Bonjour Monsieur…
je ne peux la reconnaître,
elle me tourne le dos !
Juste en dessous le tableau,
la porte qui allait me ramener vers le monde des « Terriens humains »…
Au travers des vitraux la lumière du Soleil me faisait des appels…
les couleurs étaient des arcs-en-ciel…
Avant de franchir la petite porte de côté pour rejoindre l’agitation de la vie, je lus ces quelques mots…
Je continuais ma prière « à ma façon »,
en parlant « intérieurement » avec ceux que j’aime.
Eux, connaissent depuis longtemps l’envers du décor,
l’autre côté du ciel…
A bientôt !
Petit Roseau - Nathalie K
© Texte & Photos